Reçu le : 27/03/2024, Accepté le : 29/04/2024, Publié le : 24/06/2024
Maurice LABA Université de Douala, labamaurice@yahoo.com
N°1 (2024): La catégorisation en Afrique coloniale et postcoloniale
Résumé
La présente étude explore les modalités par lesquelles le stéréotypage du migrant africain en Europe devient une modalité de catégorisation propre à la situation postcoloniale. Elle part du présupposé que la dénégation de l’heimat — du sentiment d’appartenance — au migrant africain est fondamentalement liée à la manière dont la traversée des frontières positionne l’africain dans un espace atypique de fixité identitaire. La réflexion suggère que cet état d’être est fondé sur l’appréhension unique du sujet migrant. En prenant en compte les théorisations de Campbell sur le continuum entitatif confinant le migrant à une catégorie fermée et fixée, mais aussi les propositions de Bhabha à propos du stéréotypage comme discours néo/post/colonial, ma réflexion analyse en premier lieu les épistémologies du stéréotype en situation postcoloniale, ensuite les modalités par lesquelles les fluidités identitaires, lorsqu’elles sont confrontées aux frontières, structurent le migrant comme catégorie altéritaire. Cela me permet, en dernier ressort, de révéler comment la frontière médiatise et construit le stéréotype du sujet migrant africain. Je conclus en proposant l’idée selon laquelle le refus d’un heimat à l’Africain le pousse à une négociation peu heureuse entre propriété en appropriation, et théorise en suivant Derrida qu’il s’agit là, pour le pays hôte, de jouer à « ex-approprier » le migrant de sorte qu’on aboutisse à l’échec d’une éthique à l’hospitalité.
Mots-clés : heimat, frontières, entitativité, stéréotype, catégorie.
Abstract
This study examines how the stereotyping of African migrants in Europe influences their self-categorization in a postcolonial context. It posits that the lack of a sense of belonging, or heimat, for African migrants is closely tied to being perceived as different due to crossing borders, resulting in a rigid perception of identity. The study argues that this unique state is shaped by a particular understanding of migrant identity. Drawing on Campbell’s concept of the entitative continuum that limits migrants to fixed categories, as well as Bhabha’s ideas on stereotyping in postcolonial discourses, the paper analyzes the epistemologies of stereotyping in a postcolonial context and the ways in which fluid identities are constrained by borders, defining migrants as an alterity category. In the end, this enables me to discuss how the border influences and shapes the stereotypes associated with African migrants. I suggest that the lack of a sense of belonging, or « Heimat, » for Africans leads to a difficult struggle between ownership and appropriation. Drawing on Derrida’s theories, I argue that host countries often ambiguously attempt to « ex-appropriate » migrants, ultimately resulting in a breakdown of the ethic of hospitality.
Keywords: heimat, borders, entitativity, stereotypes, categories.
Référence électronique
Laba Maurice, «Heimat, frontières, identités fluides : le stéréotype comme modalité de catégorisation en situation postcoloniale», Revue Africaine des Dynamiques contemporaines [en ligne], n°1 | 2024, mis en ligne le 01 juillet 2024. URL : https://radyc.org/